Habiter autrement

Van ouvert

L’habitat est divers et politique.

Des habitats “abris” aux habitats mobiles, de l’urbain au rural, l’appropriation se diversifie.

Le logement devient un espace d’opportunités créatives pour les habitants, adaptable à leurs besoins.

Le goût renouvelé pour les habitats « abris », cabanes, yourtes, tentes, est notoire. Il indique une volonté d’être au plus près de la nature en minimisant l’impact écologique jusqu'à renoncer au bâti.

L’habitant s’inscrit dans une autre temporalité, lui-même mais aussi son ou sa partenaire, ses enfants, ses amis, en un mot, sa famille.

Dans un documentaire réalisé pour Brut, Jo s’est retiré du « monde des fous », selon ses termes. Il est installé dans un coin reculé de la Corse, lui qui n’en est pas originaire, il a choisi un territoire, son logement est sommaire. Sans même évoquer une forme de spiritualité, ou de communion naturelle, il s’est simplement créé un rythme à lui. 

A ces habitats sommaires s’ajoutent des habitats mobiles. En constante augmentation, les vans, camping-cars, caravanes, « tiny houses », vivent une renaissance.

Synonymes de liberté et de fluidité, ils traduisent également le besoin de vivre avec moins. En effet, si la vie en communauté est possible à bord, la possession matérielle, elle, est de facto limitée. Ces habitats, pour certains saisonniers, sont encore émergents en France.

Ils invitent à une grande remise en question dans un pays de tradition architecturale lourde et valorisée. Ils disent aussi le désir de l’expérience plus que de la propriété, du quotidien plutôt que de la construction sociale. Longtemps dévalorisés car associés aux modes de vie des gens du voyage (largement discriminés) ou des vacances de classe sociale populaire, ils sont aujourd’hui le reflet d’un besoin réel de mobilité. 

Longtemps dévalorisés car associés aux modes de vie des gens du voyage ou des vacances de classe sociale populaire, ils sont aujourd’hui le reflet d’un besoin réel de mobilité. 

De leur côté, les nouveaux ruraux ne choisissent pas nécessairement ces logements. Parmi ceux qui habitent ou réinvestissent les campagnes, les bords de mer et les montagnes françaises, on note l’importance de la rénovation sur la construction, de la priorité donnée à l’ancien sur le neuf, bien souvent accompagnée de l’envie de faire beaucoup avec peu.

Rénover une maison c’est partir de l’existant et décider de faire famille avec un lieu. La vie à la campagne a également cela de différent qu’elle s’organise pour et par les habitants. Ces dernières années, l’augmentation croissante des AMAP, réseaux de producteurs et autres circuits d’approvisionnement courts est notoire, même dans les régions exploitées pour l’agriculture et l’élevage intensifs.

Ces initiatives associées à un regain d’intérêt pour l’artisanat, les métiers de bouche et les savoir-faire locaux amènent l’habitant à faire famille avec sa région, avec son village. 

La culture locale vient bien sûr enrichir cette formidable synergie, pléthore de livres, revues et magazines traduisent ce phénomène. 

Rénover une maison c’est partir de l’existant et décider de faire famille avec un lieu.

Ces changements d’échelle de l’habitat accompagnés ou non de changement de territoires portent en eux des promesses. Certaines sont plus ambitieuses que d’autres mais toutes interrogent la fonction “habiter”. 

Ces nouveaux habitants s’approprient différemment leur coquille.

Ils font de leurs contraintes économiques et de leurs valeurs écologiques un cadre renouvelé de créativité et de liberté. Leur démarche individuelle est profondément politique. Elle ouvre la voie à une émancipation vis-à-vis de l’habitat urbain. Plus encore, elle exprime une volonté farouche d’imaginer son habitat et de le réaliser pour certains de leurs propres mains.

L’habitant ne subit plus un plan, des matériaux, un emplacement, des choix faits par des constructeurs sans lui, mais redevient le maître de son ouvrage.

L’appropriation de son lieu de vie n’est plus seulement réduite à une décoration finale. Mais, elle se joue, en amont, dès le choix de son environnement, du design de l’espace à vivre et, dans certains cas, jusque dans le choix d’un habitat mobile offrant une liberté accrue.

En parallèle de ces nouvelles tendances, l’habitant traditionnel dispose lui aussi de cette opportunité créative, à l’intérieur de son propre logement. Sans déménager ou quitter la ville, locataire ou propriétaire, tout habitant peut, en repensant son espace, le faire évoluer pour mieux répondre à ses besoins. 
La satisfaction de vivre dans un espace pensé pour soi devient possible pour chacun. 


MESETYS constitue actuellement un recueil de témoignages sur ces nouvelles façons d’habiter. Si vous souhaitez partager votre expérience, envoyez un email à [email protected]

Source : “Jo vit, isolé du monde des fous, à 77 ans”, Brut

Photo de Clay Banks sur Unsplash

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